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TGV à Paris Gare de Lyon

(Complément d’analyse) Y a-t-il moins de TGV en circulation aujourd’hui qu’il y a 10 ans ?

Patricia Pérennes a reçu de nombreuses remarques concernant l’article sur les rames TGV.  Voir l’article

Elle a souhaité apporté quelques éléments complémentaires sur deux sujets clés : le nombre de sièges et la circulation des rames TGV sur lignes classiques au-delà des LGV.

Le nombre de sièges

Dans la presse spécialisée et généralisée, la discussion autour de cette problématique de capacité a porté sur le nombre de rames et sur le nombre de sièges des rames. C’est pour cela qu’elle a repris ces deux indicateurs.

Tandis que le nombre de rames est une donnée relativement simple à estimer, celle du nombre de sièges reste plus compliquée à apprécier.

Lors de sa relecture avec François Vielliard, beaucoup d’interrogations ont émané notamment sur la pertinence de la donnée « nombre de sièges de chaque rame ».

En voici deux exemples concrets :

  • Imaginons un TGV réalisant Paris > Lyon avec un arrêt au Creusot, deux voyageurs sont assis l’un à côté de l’autre. Avec ces éléments, il est facile d’indiquer qu’il y a une rame et deux sièges. Mais si l’un des voyageurs s’arrête au Creusot et un autre y remonte pour prendre sa place cela se complique. En effet, à présent 2 sièges ont été offerts à 3 voyageurs différents. Il y aura donc eu dans ce train davantage de clients que de sièges disponibles. Inversement, le voyageur Paris-Lyon a occupé un siège, mais deux places potentielles, une Paris-Le Creusot et une Le Creusot-Lyon.
  • Imaginons 2 rames identiques, de même capacité circulant sur 2 trajets différents, l’une sur Paris-Lyon, l’autre sur Paris-Lille. En deux heures, la rame Paris-Lyon a transporté autant de passagers que la rame Paris-Lille en une heure. Mais la rame Paris-Lille a le temps de revenir à Paris. Donc deux rames identiques en capacité ont offert un nombre différent de places, deux fois plus sur Lille que sur Lyon. Pourtant, elles ont parcouru à peu près le même nombre de kilomètres.

Dans les échanges lors de la relecture de son travail, il est apparu que le nombre de sièges est une donnée réductrice. Pour répondre aux objections lues dans la presse, il faudrait s’intéresser à la demande plutôt qu’à l’offre : idéalement, combien de voyageurs, année par année, se sont trouvés devant un train complet lorsqu’ils ont voulu réserver une place et, parmi eux, combien ont pu trouver une place dans un autre train et combien n’ont trouvé aucune place dans aucun train ?

De même, le kilométrage parcouru par les rames est difficile à interpréter. En effet, d’abord parce qu’il tourne autour de 30 000 à 40 000 km mensuels depuis que le TGV existe – la seule rupture forte venant des rames Ouigo qui roulent deux fois plus –  mais surtout parce qu’il faudrait pondérer par la longueur du trajet de chaque voyageur, comme le montre l’exemple du Paris-Lyon et Paris-Lille.

Quant au nombre de places dans une rame, il faut tenir compte de la demande des clients. Ainsi, quelques rames TGV Sud-Est étaient entièrement aménagées en 1re classe (287 places au lieu de 368, mais au lieu de 110 places de 1re classe dans une rame mixte 1re et 2e classes). Cela permettait de répondre à la demande, le nombre de clients en 1re classe étant le plus élevé sur Paris-Lyon (30% dans les années 1980), donc d’offrir le nombre pertinent de sièges : la demande commande le niveau d’offre.

Finalement, c’est donc le nombre de rames disponibles qui reste le critère le plus pertinent : y a-t-il des rames disponibles en réserve pour couvrir les pointes de trafic ?

Les TGV sur lignes classiques

Faut-il limiter les circulations de TGV uniquement sur LGV pour améliorer la productivité ?

Cette question a été débattue dès le lancement du projet TGV dans les années 1960.

  • Le TGV pourra rouler sur lignes classiques et irriguer le territoire, à l’inverse de l’aérotrain qui fait du point à point. C’était un véritable atout du TGV.
  • En septembre 1981, à l’ouverture de la toute première LGV, Saint-Étienne et Besançon sont desservies dès le premier jour d’exploitation. SNCF communique sur ces destinations pour répondre à l’objection apparue dans les sondages préalables où le TGV ne serait qu’un train pour les Parisiens et les Lyonnais.
  • Michel Leboeuf, dans son livre « Grande vitesse ferroviaire » analyse la desserte Paris-Grenoble et l’impact de la correspondance obligatoire à Lyon de 1981 à 1985, avant l’électrification de Lyon à Grenoble, puis du trafic par trains directs quand les TGV ont pu aller jusqu’à Grenoble. Il compare avec Paris-Besançon, en TGV directs dès 1981. Le trafic sur Grenoble n’a augmenté que lorsque les trains ont été directs. Donc même si les TGV sont moins intensément utilisés sur ligne classique, ils génèrent du trafic supplémentaire.
  • Lors de la refonte de la desserte Lyon – Saint-Étienne en 1999, 4 TGV reliaient directement Paris à Saint-Étienne et 16 TGV offraient une bonne correspondance à Lyon avec les TER. Pourtant, 80% du trafic Paris – Saint-Étienne étaient concentrés dans les TGV bien moins nombreux.
  • SNCF reste la référence auprès des élus : les maires s’adressent à SNCF pour avoir ou conserver des relations directes avec Paris. Ils ne s’adressent pas à Trenitalia ou à RENFE par exemple. Cette question de la desserte fine des territoires par TGV est abordée dans le rapport du Centre d’Analyse Stratégique « l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs » où les rapporteurs (Thomas Revial et François Vielliard) posent la question de la desserte des extrémités de lignes ouvertes à la concurrence : SNCF devrait-elle être seule s’en occuper ou peut-on contraindre, en open access, un concurrent à en prendre à sa charge ?

Conclusion : les correspondances sont une source de productivité et de rentabilité pour les trains à grande vitesse, mais offrent un service ferroviaire de moindre qualité pour les clients et un manque d’attrait pour les non-clients.

 

 

Auteur

PPE_2024

Patricia Pérennes

Date

3 octobre 2023

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